Le voyage s’était plutôt bien passé, sans retard majeur, sans perte de bagages… Je suis vraiment contente de partir enfin à l’aventure. Après cette petite heure et demie de vol, je suis donc arrivée à Antananarivo (Tananarive) en mi-journée. J’ai revu l’étendue de Tana, sa terre rouge, ses collines depuis les airs.
Nous avons été installés dans une auberge de jeunesse, la Kaze des Volontaires dans le centre. La gérante était vraiment très gentille mais il est vrai que nous étions un peu tassés dans les chambres. Le premier soir, j’ai eu la chance de manger un mijoté de zébu et de boire une bonne THB (Three Horses Beer, la bière locale). J’étais contente de retrouver mes camarades de la coopération.
Il a ensuite fallu bien de l’énergie pour faire toutes les démarches car Tana est une ville dense, très polluée et assez anarchique.
Les démarches
Lorsque nous sommes arrivés, il a fallu nous inscrire au fokontany, une autorité morale de quartier et faire certifier la photocopie de notre passeport par la mairie en attendant notre carte de résident permanent. On m’avait dit que ça pouvait prendre beaucoup de temps mais je trouve que c’est assez relatif comparé à la CAF à la Réunion pour laquelle il fallait venir au moins à 7 heures du matin car avant l’ouverture à 7h30, on pouvait avoir la surprise de voir une vingtaine de personnes déjà faire la queue.
On peut avoir plus d’étapes dans le processus mais jusqu’à présent, j’ai trouvé les administrations malgaches efficaces.
Puis il a fallu faire des photos d’identité « à la malgache » pour la demande de visa de longue durée. Il faut alors comprendre un cadre plus large, avec le haut du buste.
Nous avons eu des réunions d’information concernant la sécurité et la santé. Celle sur la santé m’a plus inquiété que celle sur la sécurité car au final, hormis les consignes habituelles (respecter les habitants et leur fonctionnement, ne pas sortir la nuit et ne pas aller là où on nous dit de ne pas aller), rien de spécial. En revanche, concernant la santé, la doctoresse nous a fait une bonne liste des maladies auxquelles nous pourrions être exposées, surtout à Itaosy, là où nous vivons. Le paludisme, qui ne concerne pas car nous sommes dans une zone exempte de risques, est une peccadille à côté de la peste, la rage (rappelons que ces deux dernières sont mortelles si elles ne sont pas soignées à temps) et de la bilharziose. Ceci dit, dans mon cas, je pense que c’est davantage la pollution et la poussière qui peuvent être un problème.
Les transports
J’avais déjà pris les taxis malgaches lors de ma précédente venue sur Tana en 2006 et je connaissais déjà l’état du parc automobile mais je ne me suis vite replongée dans ce folklore très croustillant. Les taxis de Tana sont généralement vieux et ne rouleraient probablement jamais autre part qu’à Madagascar. En 2006, la Deux Chevaux de mon chauffeur s’était arrêtée en pleine course pour qu’il puisse remettre un peu d’essence dans le réservoir ; il avait attrapé une bouteille en plastique dans la portière et nous étions repartis comme en 40 ! Cette fois-ci, j’ai eu davantage le temps de détailler les différents types de taxis et leurs spécificités : taxis courant-d’air (un clin d’œil aux cars courant-d’air que nous avions à la Réunion et probablement dans d’autres pays africains et peut-être sud-américains), taxis châssis-en-béton… La ceinture de sécurité, quand il y en a une, est au mieux bloquée. Les phares, quand ils existent, éclairent souvent peu. Mais je n’ai jamais fait ma dernière prière car il émane comme une grande confiance en soi et/ou une certaine fatalité des chauffeurs de taxis.
J’ai aussi eu l’occasion de prendre le bus. C’est également très folklorique et j’avoue que j’ai bien aimé l’expérience. Le bus est un mini-bus avec une petite pancarte fichée sur le pare-brise avant pour indiquer sa destination. A l’arrière du bus, un receveur court derrière le bus lorsqu’il ralentit pour prendre de nouveaux voyageurs. Il faut alors monter rapidement car le bus peut être toujours en marche. Il faut ensuite se faufiler pour trouver une place. Les malgaches sont souvent petits et menus donc mes genoux touchent le siège de devant et il est parfois compliqué de sortir et descendre du bus (parfois toujours en marche !). Les passagers sont souvent bien tassés mais l’ambiance est tellement meilleure que dans n’importe quel moyen de transport parisien !
Puis il y a les autres usagers de la route : les charrettes à zébu. Je les trouve magnifiques ; les bêtes sont fières et le poil beau sans compter que leurs sabots claquent sur les pavés. Nous habitons dans un quartier en périphérie de Tananarive où la première route goudronnée a été faite.
Tana m’a rappelé Paris par sa densité, sa pollution (bien que je pense que la capitale malgache décroche largement la palme) et son étendue.
La fatigue
J’apprécie beaucoup mes premiers instants à Tananarive malgré une très grande fatigue. Nous avons du faire pas mal de démarches mais surtout, le temps n’a pas la même valeur ici. Les déplacements peuvent prendre des heures pour des distances faibles ; les embouteillages sont très importants sur la capitale et on va souvent aussi vite à pied qu’en voiture ou en bus. Les routes sont en mauvais état mais c’est surtout qu’il n’y a aucun itinéraire bis. La ville a été construite pour une capacité de 500 000 habitants, nous confiait un habitant. Aujourd’hui, elle en habite 3 millions.
Puis c’est le lot de l’expatriation. Les premiers temps sont épuisants : les papiers, la langue, les nouveaux repères (géographiques, culturels, climatiques avec le froid, le soleil et l’altitude). Physiquement, c’est assez éprouvant : on marche beaucoup (Tana et ses environs sont très vallonnés), on porte beaucoup de choses (car il faut bien s’équiper), il fait froid donc le corps brûle plus (nous n’avons pas de chauffage), on doit faire attention à ne pas ramener des puces donc on doit mettre en place certaines procédures avant d’entrer dans la maison, idem pour les légumes. Je suis peut-être aussi fatiguée à cause de la grippe récemment attrapée. Je suis sujette à un asthme d’effort et aux bronchites mais vu les grosses particules dans l’air, ça devrait aller. Je compte m’acheter un masque dès que possible. Nous avons marché une petite demi-heure pour aller faire quelques courses et j’étais vraiment essoufflée. Certes, l’excitation de l’arrivée retombée, les deux nuits en auberge de jeunesse et une vigilance accrue toute la journée, font que la fatigue physique me creuse.
Enfin, avec le temps, je prendrai le rythme.
Le quartier
Nous habitons à Itaosy, un quartier semi-rural. Nous avons fait un petit tour dans le coin. Il y a une rue principale pavée, une belle église, une petite carrière en fin d’exploitation, des tombeaux le long de la route, des enfants qui jouent à la luge dans une bassine sur une pente rocheuse, des champs de songe (des trous d’environ 50 cm de diamètre) et d’autres choses, des petites boutiques le long de la route où on peut se procurer des légumes, des œufs, de la viande… Au loin, on voit des montagnes. Il fait souvent très beau à partir de 8 heures : ciel bleu et soleil intense.
La mission
J’attends cependant avec impatience de travailler. Je devrais rencontrer mes employeurs cette semaine pour en savoir plus sur ma mission et mes horaires. Car je dois être de retour avant 17h pour des raisons de sécurité.
Je glane quelques notions de malgache mais j’ai aussi hâte de pouvoir vraiment apprendre à parler malgache et découvrir cette culture fascinante. Pour l’instant, je ne comprends pas un mot de ce que les marchands de fruits et légumes me racontent lorsque j’achète mon kilo de patates douces.
Mais j’aime ces premiers moments dans un pays étranger. Une nouvelle langue, une nouvelle monnaie, de nouveaux repères, une nouvelle culture… Je pense que ces nouveaux défis participent aux fameuses nouvelles connections neuronales qui empêchent le vieillissement.
Puis il y a le luxe d’être dans une résidence où on parle principalement malgache et d’avoir la possibilité d’avoir du lait frais (encore tiède !) tous les matins. En plus, cette résidence applique une politique de protection de l’environnement (réduction des déchets, bonne gestion de l’eau, panneau solaire) qui me sont chères.
L’autre chance inestimable est d’être en contact avec Charlotte Rabesahala, anthropologue malgache. Nous avons eu l’occasion de discuter un peu et je sais que c’est un sacré privilège.
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Nahema (lundi, 11 juillet 2016 14:27)
" Il n' y'a pas d'homme plus complet que celui qui a beaucoup voyagé " ;) merci de nous faire partager cette odyssée.
Michelle (lundi, 11 juillet 2016 21:08)
Quelle plume facile et douce, tu nous transporte dans ton voyage, c'est que du bonheur, hâte de connaitre la suite...merci